Ukraine – La Pastorale des Jeunes en temps de guerre : le don d'un quotidien brisé et d'un peuple en souffrance
Spécial

22 octobre 2024

(ANS - Donetsk) - Dans la deuxième étape de sa réflexion sur la particularité de la Pastorale des Jeunes en temps de guerre, Mgr Maksym Ryabukha, Évêque Auxiliaire de l'Exarchat gréco-catholique de Donetsk, en Ukraine, présente un autre « don » à découvrir : celui d'un quotidien brisé et d'un peuple en souffrance, fait de raisons de vivre et pas seulement de survivre. Ci-dessous son analyse, livrée au magazine Note di Pastorale Giovanile.

Notre vie quotidienne, du jour au lendemain, a été bouleversée par le bruit des tirs de canon et le sifflement des missiles. Je veux dire le quotidien dans sa normalité de se lever avec le ciel rouge de l'aube ou gris de la pluie, la chaleur du petit déjeuner parfumé, le baiser avant de partir au travail ou à l'école, le retour le soir, le repas partagé, la nuit en toute sécurité dans son propre lit et dans sa propre chambre... et des rêves comme tous les rêves des gens normaux.

À partir de ce jour-là, tous nos lendemains ont changé, et aujourd'hui nous vivons un cauchemar, une tension constante, une insécurité totale. Les pièces, les fragments de notre vie habituelle, sont restés, comme si un puzzle achevé s’était écroulé. Mais nous avons réalisé que la guerre ne peut pas mettre la vie entre parenthèses. Il faut maintenant reconstruire le quotidien, trouver un fil de sens. La vie quotidienne est le seul lieu où peuvent se produire la non-perte de sens et la reconstruction de l'espoir, la croissance aujourd'hui, la promesse d'un avenir. Nous ne pouvons pas attendre la fin, alors qu’elle peut venir par la grâce de Dieu (et l’engagement des hommes). Dans la vie de tous les jours, nous ne devons pas survivre, mais vivre et trouver des raisons et des moyens de donner un sens et un goût aux choses. La vie quotidienne ne consiste pas à faire comme si de rien n'était, mais à vivre chaque instant avec les opportunités qu'il nous offre : relations familiales et amicales, rencontres communautaires le dimanche et en semaine, jeux des enfants, école et études, actions caritatives. Bien sûr, les yeux, les oreilles et les jambes prêts à affronter le danger. Dans cet espace quotidien (qui rarement n’a pas de décombres) même le temps est précieux, chaque instant est précieux, chaque instant est ressenti comme un don de Dieu, car l'instant suivant pourrait ne pas exister.

Cela peut-il être un don pour vous, de redécouvrir et de réévaluer le quotidien dans sa beauté, sa gratuité et son « merveilleux » ? Comment la nature est-elle capable de nous rendre parfois (plantes, animaux, eau) à travers sa résilience ?

Mais je n’ai pas l’intention de faire de la poésie bon marché. Dans ce quotidien fatiguant à reconstruire, à redécouvrir, nous sommes un peuple qui souffre. Pouvons-nous offrir même cela en cadeau ? Peut-on offrir sa souffrance en cadeau ? Je pense que oui, comme expérience de partage humain et aussi comme expérience d’un corps mystique. La passion et la mort du Christ ont porté la conversion du cœur humain. Je crois que la douleur inhumaine et injuste vécue dans cette période dramatique pourra convertir le cœur humain et le reconstruire dans la paix.

Je pense que la reconstruction de l'Ukraine partira de cet engagement de la Pastorale des Jeunes : éclairer les consciences, et peut-être que l'évangile des Béatitudes nous aidera, celles qui invoquent la paix et promettent le don de Dieu à ceux qui ont souffert à cause des injustices.

J'ai parlé de la vie quotidienne comme de l'espace et du temps (ici-maintenant) du caractère concret de la vie. Mais ce n’est pas un conteneur vide. Ce quotidien est habité par des personnes, des choses, des liens, voire des mémoires. Il présente et exige une nouvelle façon d'être, où la personne, le jeune, redécouvrent l'importance d'être là, de la relation, de l'essentiel et du peu. J'ai vu redécouvrir ces valeurs (je voulais dire la « spiritualité » de ces valeurs) qui probablement comptent ou valent peu ailleurs, mais ici elles sont la distance entre la vie et la mort, entre le plein et le vide, entre le sens et l'insignifiance, entre la lumière et les ténèbres. Si je devais laisser un seul message, je laisserais celui-ci, précisément parce qu'il est essentiel et vital, et que c'est quelque chose que nous avons redécouvert avec plus d'intensité dans la souffrance, et nous le confions également comme notre trésor à tous nos amis.

InfoANS

ANS - “Agence iNfo Salésienne” – est un périodique pluri-hebdomadaire télématique, organe de communication de la Congrégation salésienne, inscrit au Registre de la Presse du Tribunal de Rome, n. 153/2007.

Ce site utilise également des cookies d’autres provenances, pour enrichir l’expérience des utilisateurs et pour des raisons statistiques.En parcourant cette page ou en cliquant sur un de ses éléments, vous acceptez la présence de ces cookies. Pour en savoir davantage ou refuser, cliquez sur l’indication « Autres informations ».