France – Colloque sous l’égide de l’UNESCO sur Thérèse de Lisieux : le P. Jean-Marie Petitclerc invité à relire la « petite voie de Thérèse » comme chemin d’éducation
Spécial

02 janvier 2024

(ANS - Paris) - À l’occasion d’un colloque organisé au Conseil départemental de l’Orne, sous l’égide de l’UNESCO, le P. Jean-Marie Petitclerc, Salésien de Don Bosco, prêtre et éducateur, a été invité à relire l’héritage de Thérèse de Lisieux du point de vue de l’éducation. Il dresse un parallèle entre celui-ci et la spiritualité éducative de Jean Bosco. Nous publions aujourd'hui la première partie de ses réflexions sur le sujet.

Dans ce travail de recherche, le P. Jean-Marie Petitclerc, salésien, Normand d’origine comme Sainte Thérèse, s’appuie sur « la triple expérience éducative de la petite Thérèse : » en famille, au carmel en qualité de maîtresse des novices et sur le plan de la direction spirituelle. « S’il est une expression qui caractérise le mieux la spiritualité de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, c’est celle de « Petite Voie. » Ainsi que le rapporte Sainte Marie de la Trinité, « ce qu’elle appelait sa Petite Voie d’enfance spirituelle était le sujet continuel de nos entretiens. Les privilèges de Jésus sont pour les tout petits, me répétait-elle. Thérèse ne tarissait pas sur la confiance, l’abandon, la simplicité, la droiture, l’humilité du petit enfant et me le proposait toujours comme modèle. »

Le fondement de cette « petite voie » est l’amour.

I – UNE TRIPLE EXPÉRIENCE ÉDUCATIVE

1) En famille

« Quand nous avons eu nos enfants, nous ne vivions plus que pour eux [1] » aimait dire Zélie Martin.

La petite Thérèse, qualifiée de petite reine par son père, bénéficia de l’affection de ses parents, qui aimaient jouer avec leurs cinq filles. Les enfants ont été éduqués à l’obéissance, dans un esprit de vérité et de justice, mais imprégné de confiance et d’amour. « Chez nous, nous avons été tellement formées à l’obéissance, que celle-ci était une obéissance par amour et non par crainte des punitions. » [2]  Thérèse grandit au milieu de ses quatre sœurs, Louise, Pauline, Léonie et Céline, les trois autres enfants du couple Martin étant morts en bas âge. Elles furent pour elle des modèles à imiter.

Écoutons-la parler du « mimétisme, » avec l’histoire de ces petits oiseaux : « Je me souviens que, parmi mes oiseaux, j’avais un serin qui chantait à ravir ; j’avais aussi un petit linot auquel je prodiguais mes soins maternels, l’ayant adopté avant qu’il ait pu jouir de sa liberté. Ce pauvre petit prisonnier n’avait pas de parents pour lui apprendre à chanter, mais entendant du matin au soir son compagnon le serin faire de joyeuses roulades, il voulut l’imiter… Cette entreprise était difficile pour un linot, aussi sa douce voix eut-elle bien de la peine à s’accorder avec la voix vibrante de son maître en musique. C’était charmant de voir les efforts du pauvre petit, mais ils furent couronnés de succès, car son chant, tout en conservant une bien plus grande douceur, fut absolument le même que celui du serin. »

Et Thérèse de conclure : « Ô ma mère chérie ! C’est vous qui m’avez appris à chanter … C’est votre voix qui m’a charmée dès l’enfance, et maintenant j’ai la consolation d’entendre dire que je vous ressemble ! Je sais combien j’en suis encore loin, mais j’espère malgré ma faiblesse redire éternellement le même cantique que vous. » [3]

Après la mort de Zélie Martin, Thérèse n’avait que quatre ans et demi, c’est Pauline, sa grande sœur, qui reprit le rôle maternel. Écoutons la petite Thérèse parler de l’éducation reçue :

« Je regarde comme une vraie grâce d’avoir été habituée par vous, à surmonter mes frayeurs. Parfois, vous m’envoyiez, seule le soir, chercher un objet dans une chambre éloignée. Si je n’avais pas été si bien dirigée, je serais devenue très peureuse, au lieu que maintenant je suis vraiment difficile à effrayer… Je me demande parfois comment vous avez pu m’élever avec tant d’amour et de délicatesse sans me gâter, car il est vrai que vous ne me passiez pas une seule imperfection, jamais vous ne me faisiez de reproche sans sujet, jamais vous ne reveniez sur une chose que vous aviez décidée. Je le savais si bien que je n’aurais pas pu ni voulu faire un pas si vous me l’aviez défendu … » [4]

Cette éducation reçue en famille inspira les principes éducatifs qui furent ceux de Ste Thérèse.

2) L’expérience de maîtresse des novices

Au carmel, devenue maîtresse des novices, Thérèse fit tout pour que sa relation avec chacune s’édifie dans la confiance et que la liberté de chacune soit respectée. Elle s’adapta avec intelligence à chaque type de personnalité. « On sent qu’il faut absolument oublier ses goûts, » nous dit-elle, « ses conceptions personnelles, guider les âmes par le chemin que Jésus leur a tracé, sans essayer de les faire marcher par sa propre voie. »

Elle remarque : « J’ai vu d’abord que toutes les âmes ont à peu près les mêmes combats, mais qu’elles sont si différentes d’un autre côté (…) Aussi est-il impossible d’agir avec toutes de la même manière. Avec certaines âmes, je sens qu’il faut me faire petite, ne point craindre de m’humilier en avouant mes combats (…) Avec d’autres, j’ai vu qu’il faut au contraire, pour leur faire du bien, avoir beaucoup de fermeté et ne jamais revenir sur une chose dite. S’abaisser ne serait point alors de l’humilité, mais de la faiblesse. » [5]

3) L’expérience de la direction spirituelle

Grâce à son abondante correspondance, Thérèse deviendra accompagnatrice spirituelle de celles et ceux qui la sollicitèrent.

Arrêtons-nous sur les conseils qu’elle donnait à sa cousine Marie Guérin, qui lui confiait ses tourments issus de ses scrupules alimentés par ses séjours parisiens : « Ma Thérèse chérie, » lui écrit-elle, « je viens encore te tourmenter, et je sais d’avance que tu ne vas pas être contente de moi, mais, que veux-tu, je souffre tant que cela me fait du bien de verser toutes mes peines dans ton cœur. Paris n’est pas fait pour guérir les scrupuleux, je ne sais plus où tourner mes regards ; si je fuis une nudité, j’en rencontre une autre, et ainsi de suite toute la journée, c’est à en mourir de chagrin. (…) Je ne sais si tu vas me comprendre, j’en ai tant dans ma pauvre tête que je ne sais le débrouiller. (…) Comment veux-tu que je fasse la sainte communion demain et vendredi ; je suis obligée de m’en abstenir, c’est pour moi la plus grande épreuve. » [6]

Thérèse lui répond dès le lendemain : « Tu as bien fait de m’écrire, j’ai tout compris … Tu n’as pas fait l’ombre du mal, je sais si bien ce que sont ces sortes de tentation que je puis te l’assurer sans crainte, d’ailleurs Jésus me le dit au fond du cœur … Il faut mépriser toutes ces tentations, n’y faire aucune attention. Faut-il te confier une chose qui m’a fait beaucoup de peine ? C’est que ma petite Marie a laissé ses communions (…) Ce qui effraie Jésus, ce qui le blesse au cœur, c’est le manque de confiance. » [7]

Ainsi, dans sa réponse, Thérèse opère un déplacement. À sa cousine qui se faisait des scrupules à cause de son attachement à des images obscènes, voici que Thérèse répond que le véritable problème est son manque de confiance en l’amour de Jésus.

Source : Don Bosco Aujourd’hui

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