L'année même marquée par le plus long voyage intercontinental (Indonésie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Timor Est et Singapour), par la conclusion du Synode sur la synodalité et par l'ouverture de la Porte Sainte qui a inauguré le Jubilé, enregistre aujourd'hui ce passage délicat. Le Successeur de Pierre, malade parmi les malades, souffre et prie pour la paix, accompagné par la prière chorale de nombreuses personnes dans le monde. Lui qui, au cours de ces douze années, n'a jamais conclu une rencontre, une catéchèse ou un Angélus sans dire: «S'il vous plaît, n'oubliez pas de prier pour moi», fait aujourd'hui l'expérience de l'étreinte de la multitude croyants et de non-croyants qui lui expriment leur amour.
C'est un temps qui dévoile les cœurs. C'est le moment de s'interroger sur la nature de l'Église et sur la mission de l'évêque de Rome, très différente de celle du directeur général d'une multinationale. Il y a douze ans, le cardinal Bergoglio s'adressait aux congrégations générales en évoquant ce qu'Henri De Lubac considérait comme «le pire mal» que l'Église puisse encourir, la «mondanité spirituelle». Le risque d'une Église qui «croit avoir sa propre lumière» en comptant sur ses propres forces, ses propres stratégies, sa propre efficacité, cessant ainsi d'être le «mysterium lunae», c'est-à-dire de refléter la lumière d'un autre, de vivre et de travailler soutenue et portée uniquement par la grâce de Celui qui a dit: «Sans moi, vous ne pouvez rien faire».
En nous souvenant une fois de plus de ces paroles, nous regardons aujourd'hui avec affection et espérance les fenêtres du dixième étage de l’hôpital Gemelli. Nous remercions le Pape pour ce magistère de la fragilité, pour sa voix encore faible qui s'est jointe au chapelet de la place Saint-Pierre ces derniers jours. Une voix fragile qui continue d'implorer la paix et non la guerre, le dialogue et non l'oppression, la compassion et non l'indifférence. Joyeux anniversaire, nous avons encore tant besoin de votre voix.
Andrea Tornielli
Source: Vatican News