DÉCLARATION FINALE

Nous, les représentants de 8 peuples autochtones du Cambodge - Loun, Kbet, Toum Poun, Prov, Kachak, Kroung, Jarai et Kuy - nous sommes réunis au centre « Don Bosco » de Kep, Village Thmey, Municipalité de Prey Thum, District de Kep, Province de Kep, les 27 et 28 janvier 2024, à l'occasion de l'événement « Voices » (Voices of Cambodia Indigenous Peoples), promu par le Secteur de la Communication Sociale de la Congrégation Salésienne, pour écouter nos voix, méditer sur notre identité culturelle, sur notre langue, sur notre communauté et notre territoire ancestral, et pour transmettre un message à l'humanité.

Nous, des autochtones âgés et jeunes, nous déclarons :

1. Notre identité est liée à nos terres ancestrales. C'est le lieu où nous vivons ensemble, ce que nous reconnaissons comme l'espace de nos traditions, de notre spiritualité et de notre langue. La perte de territoire, de quelque manière que ce soit, peut compromettre notre identité, nos droits et notre existence elle-même. Nous demandons aux personnes et aux groupes qui mettent en danger le respect de nos terres ancestrales de comprendre que la protection de ces terres signifie également la protection des sources d'eau, la purification de l'air, la nourriture et vivre ensemble en frères. Lorsque nous entrons sur le territoire d’autres peuples, nous demandons la permission et faisons preuve de respect envers les personnes âgées et les traditions de ces peuples.

2. Nos langues sont également un élément important de notre identité autochtone. C'est une priorité de protéger, défendre et promouvoir les langues autochtones sur nos territoires et lorsque nous nous réunissons dans d'autres lieux. Nous demandons du soutien et des encouragements pour promouvoir les langues autochtones à travers les écoles et les médias, ainsi que pour former des enseignants autochtones à créer des systèmes écrits et d'autres moyens de développer, de faire survivre et même de récupérer les langues.

Communauté

3. L'éducation, les services médicaux et l'utilisation d'outils technologiques tels qu'Internet font partie de nos droits et ouvrent des opportunités positives pour défendre notre identité, protéger les forêts et garantir notre dignité. Nous espérons que ces éléments pourront être garantis et promus, en particulier pour les groupes autochtones les plus marginalisés dans l'utilisation de ces services.

4. Il est important de préserver la cuisine traditionnelle des peuples autochtones car elle est saine et traditionnelle, et en même temps elle est liée à la survie de l'environnement lui-même. Il est nécessaire de protéger les forêts et les systèmes écologiques et de mettre un terme à la contamination et à la dégradation de l'environnement qui mettent en danger notre santé et celle des autres habitants de la planète.

Territoire ancestral

5. Nous lançons un appel à toute l’humanité pour qu’elle mette fin à l’action chaotique et égoïste de déforestation, de dégradation et de destruction des forêts, des sources d’eau et aux actions imprudentes qui compromettent la survie des plantes et des animaux, les mettant en danger d’extinction. Nous vous prions de comprendre que de tels processus, basés sur le simple gain d’argent, mettent non seulement en danger notre survie en tant que peuples autochtones, mais aussi, à tous les niveaux, la survie de toute l’humanité sur cette planète.

6. Dans nos traditions, nous avons une manière claire d'utiliser la terre qui est essentiellement divisée en trois zones : les habitations, la forêt sacrée et la culture selon des cycles. Ce système autochtone d’utilisation des terres est respectueux de l’environnement et garantit notre durabilité. C'est également un modèle pour d'autres communautés à travers le monde. Cependant, nous voyons combien d’actions de déforestation et d’accaparement des terres détruisent ce sage système, imposant une autre production rapide qui dégrade la terre et détruit la forêt. Nous recommandons non seulement de respecter nos relations traditionnelles avec Mère Nature, mais également d'étudier ce modèle et de l'utiliser dans les endroits où l'environnement a été affecté négativement.

Spiritualité

7. Les spiritualités autochtones entretiennent des affinités étroites. Nous croyons en une parole spirituelle étroitement liée à Mère Nature. Nous défendons le droit d'éduquer nos enfants à cette spiritualité, de redécouvrir et promouvoir le rôle du Cha Thom (l’homme âgé principal) comme chef spirituel de nos communautés, comme celui qui connaît les secrets de la forêt, de nos plantes sacrées et médicinales, les animaux sauvages et les différentes manières de nos traditions. Nous respectons les autres religions et croyances, alors que nous attendons des autres qu’ils respectent les nôtres. Nous reconnaissons que parmi nous il y a des frères et sœurs qui suivent les principales religions telles que le bouddhisme, le christianisme et d'autres. Nous voulons vivre en harmonie avec les autres, car nous croyons que chaque religion apporte la paix et l'amour. Nos spiritualités autochtones, même si elles ne disposent pas de temples, sont le résultat d’une sagesse ancienne, digne d’attention et de respect. Nos temples sont nos communautés, nos maisons et nos forêts.

Combattre les discriminations

8. Nous avons besoin que les autres nous connaissent beaucoup mieux, afin qu'ils puissent comprendre et apprécier nos cultures, nos traditions et nos identités. Dans le passé, nous sommes restés silencieux, mais nous devons désormais prendre la parole et transmettre des messages à toute l’humanité, afin d’assurer une coexistence pacifique avec les membres d’autres groupes humains. Si nous parlons dans nos langues autochtones ou si nous nous habillons avec nos costumes traditionnels, cela ne fait pas de nous des « étrangers. » À ce propos, nous avons besoin de respect, mais aussi de compréhension, afin de pouvoir partager notre sagesse avec les autres.

9. Nous souhaitons remercier tous les groupes, individus et associations, ONG et programmes gouvernementaux, qui ont fait preuve d'actions concrètes pour promouvoir, protéger et renforcer les droits, la dignité humaine et la reconnaissance des autochtones. Mais les actions les plus puissantes sont celles qui sont efficaces et qui responsabilisent nos jeunes, de manière à faire de nous les principaux leaders de notre développement et de notre durabilité. Nous sommes reconnaissants envers les plateformes d’expression comme celle de « Voices. » Nous avons vraiment besoin de faire entendre notre voix.

10. Enfin, nous réaffirmons notre engagement en faveur de la récupération des langues, des mémoires, des rêves et des formes de communication de notre peuple et de nos communautés. Nous sommes les délégués de 8 Peuples Autochtones Cambodgiens, mais il existe d'autres groupes autochtones au Cambodge et finalement, nous sommes nombreux à travers la planète, la Terre Mère. Nous nous attendons à continuer à faire entendre notre voix aujourd’hui et à l’avenir pour construire un monde meilleur.

Approuvé par consensus des participants des 8 délégués autochtones cambodgiens de « Voices of Cambodia Indigenous Peoples 2024. »

Hork Rok (Toum Poun), Mana Tus (Kachak), Lar Proters Ummern (Kroung), Hanhai Aoen (Kavaet), Aokun (Prov and Loun), Pinilo (Jarai), Merci.

Centre Don Bosco, Province de Kep, le 28 janvier 2024.

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